Quelle place dans l’Histoire pour un Président de la République ?

La phrase a attiré la moquerie. À un an de l’élection présidentielle, la déclaration de François Hollande sur France Culture, ce 24 mai 2016 : “Aujourd’hui, je suis dans l’Histoire” ne pouvait qu’être reprise et retournée par ses opposants.

 

Mais sur le fond, cette phrase, et plus globalement tout le propos qui a été tenu, pose une vraie question : Quelle relation nos Présidents entretiennent-ils avec l’Histoire ? Comment construire cette relation ? Certains diraient la mettre en scène.

 

Il est évident que nos Présidents souffrent toujours d’une comparaison avec leurs prédécesseurs, républicains ou non, qui ont fait l’Histoire de France. Louis XIV ou Napoléon ont fait l’Histoire, à coup d’épée et de constructions grandioses. Assurément aidés par l’absence totale de comptes à rendre auprès de leurs sujets.

 

Mais qu’en est-il de nos Présidents de la République ?

 

Le premier d’entre-eux Louis-Napoléon Bonaparte a liquidé la République au bout de trois ans pour devenir Empereur. Et c’est sous le nom de Napoléon III qu’il est passé à la postérité.

 

Patrice de Mac-Mahon et Adolphe Thiers ont marqué l’Histoire car ils ont vécu les tragiques évènements de la guerre franco-prusienne et de la Commune. Mais qui se souvient de Jean Casimir-Perier ? De Sadi Carnot ? De Jules Grévy dont le ministre de l’Instruction Publique, Jules Ferry, a eu un poids historique bien supérieur ?

 

Albert Lebrun vécut les évènements les plus tragiques du XXème siècle, la défaite de la France et l’effondrement de l’armée de la République dans les chaudes journées de juin 1940. Qui s’en souvient ? Qui s’interroge sur son rôle dans la débâcle ? Qui le blâme d’avoir nommé Philippe Pétain Président du Conseil ?

 

Quelle empreinte les deux Présidents de la IVème République ont-ils laissée ? Vincent Auriol mais surtout René Coty volontairement choisi par les parlementaires car inconnu parmi les inconnus.

 

Sans conteste Charles de Gaulle a voulu réinscrire le Chef de l’Etat dans la lignée des figures historiques françaises. Et pour se faire, la Constitution et sa vie personnelle ont été des atouts de poids. Prisonnier à Verdun, chef de la Résistance et restaurateur de la République, il était dans l’Histoire avant de devenir Président de la République. Un avantage considérable dont ne bénéficia aucun de ses successeurs.

 

Georges Pompidou, Valéry Giscard d’Estaing, François Mitterrand et Jacques Chirac ont connu la guerre a des degrés divers, ils ont vécu le tragique qui est un marchepied incomparable vers la grandeur et la solennité.

 

Comment marquer l’Histoire lorsqu’on a connu que la paix ? Lorsque devenu Président de la République il n’est plus question de lancer les armées à la conquête de nouvelles provinces ? Lorsque la République n’est plus menacée ?

 

Néanmoins à la différence de ses récents successeurs, François Hollande a peut-être connu davantage de tragique, la guerre au Mali par exemple, où il a du prendre seul la décision d’envoyer des milliers de jeunes soldats combattre dans l’aridité du désert, un ennemi déterminé. Mais aussi et surtout l’horreur des attentats de 2015. Peut-être est-ce cela qui sera retenu de son passage à la tête de l’Etat.

 

Car il est indéniable que personne ne rentrera dans l’Histoire pour avoir réduit le chômage ou la dette. L’Histoire ne s’intéresse pas aux bons gestionnaires mais aux créateurs de rêves.

 

La communication politique a un rôle à jouer pour aider les Présidents à entrer dans l’Histoire. Mitterrand a tout misé sur le concept de monarque républicain, il a voulu marquer physiquement la France et personne n’a autant modifié Paris depuis le baron Haussmann.

 

Les grands personnages de l’Histoire sont ceux qui ont laissé de grands héritages. Ceux qui ont non-seulement marqué leur temps mais dont l’oeuvre perdure à travers les décennies et les siècles. Encore faut-il bâtir le dit héritage et s’assurer qu’il soit reconnu à sa juste valeur.

 

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