Les Macron de l’histoire politique

On les encense, on les adule, on leur prédit l’avenir le plus brillant. Un jour on se met à penser à la présidentielle, car en France on pense assez vite à la présidentielle, et on se dit qu’ils feraient de tellement bons présidents de la République.

 

Alors on se dit que c’est eux ! Que c’est une évidence, qu’ils vont apporter un vent de nouveauté dans notre vie politique sclérosée et accaparée par de vieux messieurs qui n’y comprennent plus rien.

 

Et puis on réalise les premiers sondages qui confirment que ce sont eux que les Français veulent, alors on diffuse des reportages pour dire aux Français à quel point ils sont modernes et vont remettre la France dans le droit chemin. Tout cela s’enchainant dans la joie et la félicité.

 

Eux ? Ce sont ces hommes et femmes politiques qui tombent du ciel et passent en un temps record de l’anonymat à la course à l’Élysée faisant fi de toutes les étapes traditionnelles.

 

On ? Les médias bien sûr mais aussi une bonne partie du monde politique, qui aime se trouver des nouveaux champions, mais également des Français lambda qui aimeraient voir de nouveaux visages dans le champ politique.

 

Mais un seul d’entre eux a-t-il seulement réussi à aller jusqu’au bout ? Les statistiques sont-elles favorables à Emmanuel Macron qui a franchi le Rubicon et ne pourra prolonger sa carrière politique que par un succès (au moins relatif) en 2017 ?

 

Historiquement le premier à avoir connu une ascension éclair est Jean Lecanuet, brillant jeune politique du début des années soixante, sa capacité à s’exprimer à la télévision avec aisance en fait l’un des premiers hommes politiques télégéniques. On lui prédit un destin exceptionnel, voire la capacité de battre le général de Gaulle en 1965 lors de la première élection présidentielle au suffrage universel direct. Hélas il n’en est rien, et un score honorable de 15% ne lui permit pas de peser ultérieurement. Sa carrière nationale s’arrête en 1977 après avoir été Garde des Sceaux.

 

Dans les années 80, les années fric, Bernard Tapie est omniprésent. Dans les affaires, les médias, le football, la musique (si, si). On ne voit que lui. Aussi quand il décide de se lancer en politique, au sein du PS et à Marseille pour défier directement sur ses terres un Jean-Marie Le Pen à l’apogée de sa forme, tout le monde l’imagine aspirant aux plus hautes fonctions. Devenu ministre de la Ville, l’emballement est généralisé, Tapie sera Président en 1995 ! Rêve brisé, par les affaires bien sûr mais aussi par une opposition généralisée de la gauche et un abandon en rase campagne par François Mitterrand une fois passées les européennes 1994.

 

Plus récent est le cas de Ségolène Royal, députée des Deux-Sèvres depuis 1988, ministre sous Pierre Bérégovoy, elle jaillit sous le feu des projecteurs après sa victoire en Poitou-Charentes lors des régionales 2004. Dès lors tout le monde médiatique s’emballe, femme moderne, vainqueur d’une élection difficile, pourquoi ne deviendrait-elle pas candidate du PS face aux éléphants ? Candidate elle le sera, mais les éléphants sont rancuniers, et au second tour de l’élection présidentielle elle est défaite par Nicolas Sarkozy. Après cela il fût difficile de maintenir l’intérêt, et faute d’une réelle adhésion sa candidature à la primaire socialiste de 2011 a tourné au fiasco suivi d’une législative chaotique et perdue à La Rochelle.

 

Alors les statistiques sont-elles en faveur d’Emmanuel Macron ? Clairement, non. Dans un système institutionnel, quel qu’il soit, il est difficile de prouver sa valeur en deux ans à peine. Et dans notre vieille France où le président de la République est un monarque républicain, le peuple hésite encore à confier son destin à un homme ou une femme qu’il ne connaît pas depuis très longtemps.

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